CHAMBRE DES REPRÉSENTANTS DE BELGIQUE
COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE
mercredi 23-11-2005 Après-midi
Questions jointes de
M Patrick De Groote au ministre de la Défense sur
« le programme des dragueurs de mines côtiers »
M. Luc Sevenhans au ministre de la Défense sur
« le projet DMC »
(Dragueur de Mines Côtiers
Patrick De Groote (N-VA):
Le gouvernement a décidé en 2000 de mettre fin au programme DMC. La Cour des comptes a calculé que le coût total de ce programme s’élève déjà à 28,29 millions d’euros.
Lors de l’arrêt du programme, l’entrepreneur principal a exigé une indemnisation d’environ 37,18 millions d’euros, ce que le ministre a estimé excessif.
Quand les autorités fédérales ontelles effectivement été condamnées? Quelle partie du
programme DMC a été réalisée et quels montants y ont été consacrés? Combien de dragueurs de mines possédions-nous et combien en avons-nous encore fait procéder à des modernisations avant la vente?
Les dragueurs de mines restants sont-ils également équipés d’instruments de mesure modernes?
Luc Sevenhans (Vlaams Belang):
L’affaire est toujours pendante devant la juridiction d’appel mais j’espère une confirmation du jugement précédent car le gouvernement a traité cette entreprise d’une manière scandaleuse.
Le ministre a déjà admis à plusieurs reprises que la capacité en matière de dragage de mines reste une nécessité. Il serait logique que nous collaborions à un projet éventuel avec les Pays-Bas.
Quel est l’état de la situation?
Pouvons-nous encore récupérer une partie du montant investi de 1,3 milliard de francs qui, sinon, serait perdu?
André Flahaut, ministre:
Monsieur le président, pour que cela soit bien enregistré, je répète que j'ai déjà répondu à de très nombreuses reprises à cette question. C'est un peu l'illustration du fait qu'une fois que les choses ont été décidées dans un contexte international donné, on ne peut plus rien changer et donc que le ou les responsables politiques, et ici il s'agit du gouvernement, ne pourraient plus changer aucun programme décidé par la Défense, quelle que soit l'évolution de la situation internationale.
C'est très bien! Continuons comme cela! Mais cela veut alors dire qu'on aura accumulé dans nos hangars encore plus de matériel inutile que ce que nous avons aujourd'hui à la suite d'une succession de commandes inutiles. En 2000, donc à la suite des élections de 1999, le nouveau gouvernement a décidé de ne pas continuer le projet KMV. Cette décision a été prise dans le plan stratégique le 12 mai 2000.
Pour répondre à la question de M. De Groote, voici ce qui a été fait avant cette décision du gouvernement.
Les postes suivants du programme DMC ont été réalisés:
l’acquisition d’un système de dragage des mines flottantes (11,1 millions d’euros),
l’achat d’appareillages de mesure (3,1 millions)
la transformation d’une plate-forme d’essais (2 millions d’euros) et la première phase du
programme de construction proprement dit (5,5 millions d’euros).
C'était ce qui se faisait avant que la décision soit prise par le gouvernement en 2000 dans le programme "Stratégie". Je vous affirme que ce n'est pas un ministre seul qui a pris cette décision.
C'est une décision du gouvernement tout entier.
De combien de chasseurs de mines disposait-on? Il faut bien faire la différence entre les KMV et les CMT.
Dans le cadre du programme tripartite mis sur pied avec les Pays-Bas et la France, la Belgique avait acheté à l'époque dix dragueurs de mines. Les dragueurs de mines n'ont pas été vendus dans le cadre du programme DMC mais dans celui du plan de réforme du ministre Delcroix de 1993. La France a acheté trois bâtiments pour un montant de 70,6 millions d'euros.
Les navires en question n'ont pas été modernisés mais ils ont été rendus à nouveau opérationnels.
Les 6 chasseurs de mines restants ont-ils été adaptés avec des moyens de mesure modernes et, le cas échéant, pour quel montant?
Six dragueurs de mines bénéficient actuellement d’un programme dit de "Capability Upkeep" (mise à jour de capacité) organisé en collaboration avec la marine néerlandaise et pour un coût de 76 millions d’euros. Quant au septième dragueur de mines, il
a été mis en vente. Je vous signale que l'affaire est toujours en jugement. Nous sommes
allés en appel et nous entendons bien ne pas nous laisser faire.
Toutes les parties du programme KMV qui ont été réalisées contribuent encore à la connaissance en guerre des mines au profit de tous les navires. Cela n'est donc pas perdu.
Le plan directeur de décembre 2003 ne prévoit pas d'investissements pour une nouvelle capacité de dragage de mines. Les investissements du passé ne sont pas perdus. De plus, les différentes campagnes de mesure avec le système de dragage à influence ont
permis de récolter une masse de données. Les appareils de mesure sont toujours employés ainsi que les résultats de la première phase.
Patrick De Groote (N-VA):
L’arrêt du programme et les coûts qui y sont liés relèvent en effet de la responsabilité de l’ensemble du gouvernement. C’est le premier ministre Verhofstadt qui, en 2000, avait déclaré que la guerre froide étant terminée, nous n’avions donc plus besoin de ces
commandes. J’espère que ce dossier finira bien car des sommes colossales sont en jeu.
Mais je crains que nous soyons perdants dans cette affaire.
André Flahaut, ministre:
On va laisser la justice juger de l'affaire.
Je voudrais simplement faire remarquer qu'on met souvent en évidence ce que réclament certaines firmes. C'est d'ailleurs le droit de tout un chacun d'agir en justice. Ce que le juge décide, c'est autre chose. Certaines firmes ont réclamé certaines choses dans certains
dossiers mais n'ont jamais obtenu gain de cause devant le juge. Et de cela, on ne parle jamais.
Luc Sevenhans (Vlaams Belang): Contrairement à M. De Groote, j’espère que nous allons être perdants car ce dossier n'a pas été traité correctement.
Il faut d'abord se concerter avec le gouvernement avant de passer une commande. En faisant le contraire, le ministre s’est mis en difficulté.
Le ministre a toujours répondu de manière complète et détaillée à nos questions en la matière parce qu’il ne se sentait pas responsable. Le premier ministre Verhofstadt a sabordé ce programme parce qu’il avait une trop forte connotation CVP.
L’argument de la guerre froide n’est pas sérieux. Il s’agissait en fin de compte d’une opération comptable. On a cru réaliser des économies, et le contraire s’est réalisé.
L'incident est clos.
CHAMBRE DES REPRÉSENTANTS DE BELGIQUE
COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE
mercredi 22-02-2006 Matin
Question de M. Luc Sevenhans au ministre de la Défense sur
« la structure organique de la composante « Marine » »
Luc Sevenhans (Vlaams Belang):
Le 1er février, je n’ai pas obtenu de réponse satisfaisante à ma question concernant le commandant de la Composante Marine.
Les structures organiques des Forces armées prévoient le grade d’amiral de flottille pour le commandant de la Composante Marine et le grade de général major ou d’amiral de division pour les commandants de toutes les autres composantes.
La loi relative au statut des officiers de carrière des forces armées ne prévoit pas le grade
d’amiral de flottille.
Ce grade n’est normalement conféré que pour la durée d’une mission.
Le commandant de la Composante Marine cumule sa fonction avec celle de Deputy Admiral Benelux et est donc investi d’une importante mission de représentation à l’étranger.
Bien que la loi prévoie la possibilité de désigner un amiral de flottille dans ce contexte, elle n’interdit pas explicitement l’attribution d’un grade supérieur pour cette fonction.
La décision du ministre de ne pas placer le commandant de la Composante Marine sur le même pied que les autres commandants n’est donc pas fortuite mais les motifs réels restent flous.
Une analyse de la structure organique des Forces armées montre que la programmation des fonctions de général a subi un nombre important de modifications.
Je ne suis pas de ceux qui pensent que notre armée compte un nombre excessif de généraux. Ce n'est pas au niveau de leur nombre que le bât blesse mais au niveau des fonctions qu'ils sont amenés à exercer. A la Direction générale des ressources humaines, il n'y a qu'un général pour un effectif de 134 personnes.
Le rapport est d'un général pour 39 fonctions au département ACOS STRAT, contre 1 pour 21 fonctions au service de l'IGM.
D'où vient cette discordance?
Comment le partage est-il effectué?
Quels critères sont retenus pour affecter un général à telle ou telle fonction?
André Flahaut, ministre:
Madame la présidente, l'organisation interne d'un département ministériel ne fait pas l'objet de débats parlementaires.
Luc Sevenhans (Vlaams Belang):
Sur quoi le ministre se base-t-il ?
André Flahaut, ministre:
Je me base sur la réglementation et sur le fait que je n'ai pas à vous répondre au sujet des critères retenus par l'état-major pour désigner telle ou telle personne à tel ou tel endroit. Cela fait partie d'évaluations permanentes. Il n'y a pas à donner d'appréciation sur ce sujet au Parlement.
Luc Sevenhans (Vlaams Belang):
Le ministre a pourtant déjà répondu par le passé à des questions concernant le nombre de généraux.
André Flahaut, ministre:
Monsieur Sevenhans, j'estime que vous dépassez certaines limites. Dorénavant, je vous répondrai juste ce qu'il faut, ni plus, ni moins!
Luc Sevenhans (Vlaams Belang):
Voilà qui serait un véritable tournant.
André Flahaut, ministre:
Les réponses que je vous donne sont les réponses convenables. Si elles ne vous plaisent pas, cela m'indiffère. Ce sont mes réponses, il faut les prendre ainsi. Si vous voulez les communiquer ou continuer vos enquêtes, vous continuez.
Je suis très calme, très zen. Une fois, je suis calme, une fois, je ne le suis pas. Aujourd'hui, je suis très calme et tout sourire, mais je peux dire à quelqu'un qu'il m'emmerde!
André Flahaut, ministre:
Je n'ai pas à vous donner d'explications. Les procédures de mise en place et d'évaluation sont faites par l'état-major, par la structure elle-même. Et donc, en clair, cela arrive à un certain moment avec des propositions qui sont faites par l'état-major et puis c'est tout. Vous comparez avec l'armée hollandaise. L'armée hollandaise est une chose, l'armée allemande est une autre chose, l'armée française idem. La seule chose que je peux vous dire, c'est que ces armées-là regardent aujourd'hui ce que nous faisons en Belgique pour se transformer. C'est ce que je constate.
S'il y a, je l'ai déjà dit à plusieurs reprises, des gens qui, à l'intérieur de la structure, n'ont pas les étoiles pour leur permettre de parader dans les cocktails, c'est leur problème. Moi, je préfère faire la promotion de gens, et je ne savais qu'il serait là de toute façon, qui
travaillent et qui sont compétents pour diriger les structures. Ca, c'est ma politique. Indépendamment de l'appartenance linguistique ou politique. Quelqu'un de compétent, oui. Mais, pour le reste, il y a toujours des gens qui effectivement, à un certain moment, ont fait des plans de carrière et c'était en 99.
J'ai découvert des personnes qui m'ont engueulé, parce qu'on ne les avait pas désignées comme général.
Et j'ai dit: pourquoi? Parce qu'on m'avait dit que je serais général. J'ai dit: qui vous a dit ça? Dans mon corps, dans mon arme, on m'avait dit que si j'étais chef là-bas, je deviendrais chef là-bas, puis je serais chef là-bas, etc. J'ai dit: ceux qui vous ont dit cela n'ont pas le pouvoir de désigner, de décider.
Dans ces conditions, vous vous êtes fiés à des promesses qui vous ont été faites par des gens qui n'avaient pas à les faire.
Mais, les procédures, croyez-moi, elles sont très précises. D'ailleurs, même la Fonction publique fédérale s'en inspire. Au moment où on a discuté des formations, des évaluations, au niveau de la Fonction publique fédérale, les gens de Copernic sont venus voir. Ils ont dit que finalement, au niveau de la Défense, c'était beaucoup plus précis,
beaucoup plus sévère, beaucoup plus contraignant et beaucoup plus permanent que dans la Fonction publique.
Donc, ce système-là, il fonctionne et il aboutit à des décisions qui jusqu'à présent ne sont pas contestables. Moi, je n'ai pas à me plaindre des personnes qui sont au plus haut degré de la hiérarchie.
Et si Somers a plus d'étoiles que Robyns et qu'il a plus de personnel que lui, c'est parce que Robyns a, dans l'opérationalité, quelques centaines de personnes et des frégates alors que l'autre doit gérer les 42.000 dossiers qui existent au sein de la Défense.
Si De Winter a trois étoiles et plus de personnel, c'est parce qu'il a dû mettre en oeuvre l'aboutissement de tous les projets d'achats et d'acquisitions militaires.
C'est ainsi. Il faut aussi sortir de la logique des TO, ces tableaux organiques figés, qui font que quelqu'un de compétent, qui réussit des examens dans sa formation de major à Safraanberg, s'entend proposer d'aller travailler à Bruxelles à cause d'une inscription sur le TO. On n'agit plus ainsi: si quelqu'un est utile à Safraanberg, qu'il est spécialiste en
matériaux composites, il y restera, même s'il est investi d'un grade supérieur.
Ces techniques ont changé. Il se peut qu'à Safraanberg, quelqu'un attendait la place de celui qui aurait dû partir une fois formé. Des spéculations avaient lieu. Aujourd'hui, on essaie de juger les personnes comme des individus, en tenant compte de leur passé.
Robyns a géré le centre opérationnel et est venu expliquer les opérations. Aujourd'hui, il vient d'être désigné et la première chose que l'on fait, c'est mettre en opération une frégate dans le "Enduring Freedom". J'ai au moins la certitude que la personne désignée suivra correctement la mission.
Quand j'ai pris Pochet comme chef de cabinet, c'est parce qu'il était à l'époque le commandant des troupes qui partaient pour la première fois en Afghanistan; il fallait avoir à proximité quelqu'un qui connaisse les gars sur le terrain. Il est alors parti à la Composante Terre, parce qu'il connaît bien les gens sur le terrain, il vit avec eux, il connaît bien leurs problèmes.
C'est ce qui m'intéresse et je n'ai pas besoin de généraux de salon. Ce n'est pas dans les cocktails, d'ailleurs je n'y vais pas, qu'on fait l'armée. On y fait peut-être de la politique ou on essaie de la faire.
Mais moi je la fais sur le terrain avec les gens qui sont sur le terrain.
Luc Sevenhans (Vlaams Belang):
Si j’avais reçu cette réponse il y a quelques jours, je n’aurais pas dû reposer la question.
L'incident est clos.