Mary Celeste
La mer a toujours fasciné les esprits, suscitant un grand nombre d'histoires colportées par des marins à l'imagination enflammée, L'une d'elles, l'énigme de la Mary Celeste, contribue largement à entre-tenir le mythe des vaisseaux fantômes.
Un vaisseau maudit ?
La Mary Celeste semble avoir été marquée par le destin. Son premier capitaine meurt avant même le voyage inaugural au cours duquel un bateau de pêche est heurté.
En 1856, le bateau s'échoue au large de Key West.
Le 10 juin 1864 alors que le bateau se nomme encore l'Amazon, l'un de ses nombreux commandants Henri Winchester se noie dans le port de Boston.
Racheté par de nombreux armateurs, le bâtiment fait à nouveau naufrage, sur l'ile du Cap Breton en 1967, au retour d'un voyage en Angleterre durant lequel il a coulé un brick.
Passé à un autre propriétaire et rebaptisé Mary Celeste, il reprend la mer.
Vendue et réparée, la Mary Celeste reprend peu après la mer.
Mais les marins l'estiment maudite : elle change de mains 17 reprises pour échapper, en vain, à sa sinistre réputation.
En janvier 1885, son dernier capitaine G.C. Parker, pour toucher l'assurance ( hé oui, à cette époque, les gens escroquaient déjà les assurances ), le jette volontairement sur des brisants au large d'Haïti. Convaincu pour cela de « crime de baraterie1 », il est arrête mais meurt avant de passer en justice.
Mais revenons en 1872, l'année du drame qui la rend célèbre.
Le 5 décembre 1872, le Dei Gratias, commandé par le capitaine Morehouse, se trouve à 600 miles au large des côtes portugaises, lorsqu'il croise un bateau, la Mary Celeste, qui zigzague curieusement et dont presque toutes les voiles sont carguées.
Le bâtiment ne répond pas aux signaux, Morehouse le rejoint et demande à trois de ses hommes de monter à bord.
Les marins visitent le vaisseau, qui se révèle désert et sans canot de sauvetage. Dans les cales, ils découvrent 1.700 fûts d'alcool et des vivres pour au moins six mois.
Le bateau est en bon état, malgré une grosse quantité d'eau dans les cales. En revanche, le sextant, le chronomètre et les livres de navigation ont disparu. Le journal de bord s'arrête au 25 novembre, inscription laissant penser que le vaisseau a dérivé seul pendant plus de 15 jours et parcouru environs 500 miles.
D'autres surprises attendent les marins, notamment le fait que les 6 fenêtres des logements de l'arrière sont condamnées par de la toile et des planches. L'équipage semble avoir quitté précipitamment le vaisseau sans raison évidente, pour disparaître à jamais.
Cette enquête va être difficile.
La Mary Celeste est ramenée au port de Gibraltar et examinée par les autorités judiciaires. Les résultats se révèlent décevants, à l'exception de la découverte d'une entaille récente, longue de 2 m, située au-dessus de la ligne de flottaison. Des traces rougeâtres sont relevées sur le bastingage mais des expertises ultérieures prouvent qu'il ne s'agit, en fait, que de rouille.
L'hypothèse du procureur général Solly Flood est que l'équipage de la Mary Celeste s'est enivré et a assassiné le capitaine, un certain Brigge, ainsi que sa femme, sa petite fille et le lieutenant. Les marins auraient ensuite endommagé le vaisseau pour donner l'illusion d'avoir été contraints de l'abandonner après avoir heurté des rochers, puis ils seraient partis sur les canots de sauvetage.
Mais, comme aucune trace de violence ne peut être constatée à bord du bateau, cette explication ne convainc pas tout le monde.
Selon le lieutenant Deveau, du Dei Gratias, les marins, effrayés par la grande quantité d'eau ayant envahi les cales on ne sait pour quelle raison, auraient abandonné le vaisseau, pensant qu'il était perdu. Pour lui l'équipage est mort en mer. Mais cette seconde hypothèse ne convainc personne. Des marins aguerri quittant leur navire tout en sachant que sur des canots leur vie est en danger. Non, décidément l'enquête piétine.
Sitôt connu, le mystère de la Mary Celeste fait la une des journaux dans le monde entier, par la suite, l'enquête n'étant pas parvenue à résoudre l'énigme, les magazines demandent à des auteurs de concevoir une explication.
Les plus folles histoires circulent.
Conan Doyle et H.G. Wells répondent à l'appel. Les années passant, les solutions les plus diverses sont proposées.
Ile volcanique qui aurait soulevé momentanément le bateau.
Attaque d'un poulpe géant.
Folie collective.
Empoisonnement.
Et même, enlèvement par des extraterrestres.
Un journaliste du nom de William Klein imagine, quant à lui, une escroquerie montée par Brigge et Morehouse pour toucher et se partager la prime de sauvetage. Mais, cette mise en scène suppose beaucoup d'efforts pour faire disparaître et faire réapparaître un équipage. De plus pour un résultat plus que modeste, en effet, l'équipage du Dei Gratias n'ayant reçu, à titre de prime de sauvetage, que 8.528 dollars, soit le cinquième de la valeur de la cargaison.
La légende ne cesse cependant de s'embellir et certains éléments merveilleux sont ajoutés après coup, comme la prétendue découverte dans la cuisine de la Mary Celeste d'un poulet encore chaud et de tasses de thé fumantes.
En 1885, La Mary Celeste s'échoue une dernière fois, emportant à jamais son secret qui demeure un des plus célèbres de l'histoire de la mer.

A bientôt pour une nouvelle histoire magique.
Vocabulaire :1 – Baraterie
Préjudice volontaire causé aux armateurs, aux chargeurs ou aux assureurs d'un navire par le capitaine ou un membre de l'équipage.
A bientôt pour une autre histoire...................